"Guru Rest In Peace / Rendre hommage, ok, mais pourquoi?"
Dj Premier était en concert à Poitiers le mois dernier, histoire de régaler avec un passage en revue de toute ses productions qui ont contribuées à sa légende...Nas, Mobb Deep, B.I.G, Kanye West, Rakim, Mos Def, Jay-Z, j'en passe et des meilleurs ont tous un jour posé sur un beat de Primo, collaboration symbole de réussite et et d'adoubement par un des plus fervent activiste du Hip Hop.
Dailleurs, pour certains d'entre eux, la collaboration avec Premier fut le seul véritable coup d'eclat...sans vouloir citer Royce da 5'9 ou encore le fameux Soulkast (dont la parodie me plie toujours en quatre).
Travailleur acharné, à la recherche constante d'un résultat sonore tel qu'il se l'était imaginé dans la tête
( il faut voir Primo parler dans le film Scratch de Doug Pray), identité musicale très forte avec ses instrus boum bap, colorées aux samples de jazz et de soul, le son de Primo est reconnaissable entre mille, toujours efficace, rarement décevant.
Mais sa véritable collaboration, ce fut bien évidemment avec le rappeur Guru. Collaboration naissante en 1989 pour donner le mythique groupe Gang Starr. Guru le MC. Primo le DJ et le Beatmaker.
6 albums, dont 5 font parti sans hésitation des chef d'oeuvre du Hip Hop, plus d'une décennie de hits, de fracassage de nuque, de morceaux magiques. L'alchimie parfaite, la complicité exemplaire entre un beatmaker et un rappeur, SON rappeur. Symbiose sonore de presque 15 années jusqu'à leur séparation en 2003 après un dernier album un peu plus anodin et une brouille entre les 2 comparses, suivi par le décès de Guru en 2010.
Guru justement. MC au flow monotonal, calme, posé, immédiatement reconnaissable, parole de Gang Starr intemporelle, amoureux de jazz auquel sa fameuse série des Jazzmattaz rendra hommage.
Guru, dont le décès longtemps redouté suite à une belle saloperie de cancer est finalement survenu le 19 avril 2010, il y a donc un an jour pour jour.
Et ce fut l'avalanche de louanges, de RIP, de In Memory Of, de témoignages de sympathie automatiques... Curieux rapport que l'on entretien avec le décès d'un artiste "connu".
Là où tu te rends compte que l'unanimité émotionnelle sonne bizarrement chez certaines personnes ou certains médias... réflexe pavlovien de "l'hommage", du "RIP", du sentimentalisme déplacé, histoire d'être dans le coup, sans plus trop bien savoir à qui et à quoi on désire rendre hommage.
Guru, c'était un rappeur, c'était le rappeur de Gangstarr. Et le rap , CA S'ECOUTE.
L’écoute, voilà dans quoi le passage de Primo à Poitiers m'a fait replonger. Et notamment cet album, "Full Clip: a Decade Of Gang Starr", qui comme son nom l'indique, et plus un best of des 10 premières années de Gang Starr qu'un véritable album. Conçu à partir des meilleurs titres des 5 premiers albums et d'inédits, cette double compilation est juste un chef d'oeuvre...Tout a déjà été dit sur ce best of tellement emblématique de ce que fut Gang Starr. Très riche en ambiance variées, du minimalisme crado, à la relaxation douce et sereine en passant par les balades jazzy et les gros classic dangeureux pour les cervicales.
Combien d'albums, qui à leurs réécoutes, vous replongent dans tout un univers, une histoire, votre histoire?
Ceci en est la parfaite représentation...
Là où chaque track est liée à une date, un instantané, un moment de vie, de leurs vies, mais aussi de celles de leurs auditeurs, à travers le monde.
Là où l'on se rend compte que la qualité d'un album de rap ne se mesure pas en chiffre de vente mais à sa capacité à raconter quelque chose, à emmener dans une ambiance, une couleur, à sa capacité d'être adopté par celui qui l'écoute.
Là où il est question de rapport personnel avec une musique, et certains de ces artistes.
Là ou certains d'entre eux te marquent au fer rouge sans que tu comprennent vraiment pourquoi.
Là où tu te rends compte qu'on est en 2011 et que ça sonne quand même toujours méchamment.
Là où tu te rends compte que tu viens de t'enfiler les 33 morceaux de cet album d'affilé, sans ciller, complètement hypnotisé.
Là où tu te rend compte que tu n'as même pas zappé la 3, celle avec la meuf relou qui chante et que t'aimais pas du tout il y a 10 piges.
Là où tu te rends compte que tu sais pourquoi tu aimais autant cette musique il y a plus de 10 ans, pourquoi tu l'aimes autant, et pourquoi tu continueras de l'aimer.
Là où tu te rends compte que tu as envie que tout le monde expérimente la même chose.
Là où tu te rends compte de l'importance de l'héritage laissé par Primo et surtout par Guru, sa voix, son flow, sa sérénité, ses histoires de rue, de vie, de rap, de femmes, d'esprit et de jazz.
Là où tu te rends compte que Gang Starr ne sortira rien de plus, Guru est mort, qu'il reste en paix,
"Up in the sky, above the clouds."
Toi, après ces putains de 33 morceaux, tu te sens juste bien.
"I'm gonna miss hearing his signature monotone voice when he walks in the room, but the songs will always bring it back to me ... His rhyme flows were insane, and I will never remove him from my heart and soul. Rest in peace to the man who felt 'satisfaction from the street crowd reaction.'
I love you Goo ..." DJ Premier
GURU - Gang Starr / JazzMatazz - 17 juillet 1961 - 19 avril 2010
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